Rétrospective

Hommage à Lino Ventura. Stadtkino Basel

Hommage à Lino Ventura. Stadtkino Basel

Nous sommes associés à cette série de films que présente le Stadtkino Basel et pour laquelle nos membres bénéficient d’une réduction de 50 % (entrée 8 Fr. au lieu de 17 Fr. sur présentation de la carte de membre à jour).

Comme dans les histoires au cinéma, c’est par hasard que tout a commencé : en 1953, Jacques Becker cherche un italien pour faire face à Jean Gabin dans Touchez pas au grisbi. On lui présente un habitué de la salle Wagram à Paris, l’ancien champion d’Europe poids moyens de lutte gréco-romaine, qui est alors organisateur de combats. Becker est immédiatement séduit mais Lino Ventura refusera dans un premier temps… Lui, qui toute sa vie conserva sa nationalité d’origine et parlait pourtant sa langue maternelle avec un léger accent hexagonal, est définitivement le plus français des acteurs italiens. Lino, de son nom complet, Angiolino Giuseppe Pasquale Ventura, reste d’ailleurs l’un des acteurs les plus populaires en France. En effet, à l’instar de son mentor et ami Jean Gabin, il fait partie de ces grandes figures du cinéma qui incarnent toute une époque, celle où « populaire » s’entendait encore au sens noble du terme. De noblesse, ce fils d’immigrés, ancien lutteur et complet autodidacte – il ne prit jamais de cours de comédie – n’en manqua jamais. Si sa carrure, sa « gueule » et certainement aussi l’engouement des années 50 et 60 pour le film noir l’amenèrent à interpréter essentiellement des rôles de truands et de policiers vieillis, désabusés, illustrant une certaine idée de la virilité, il savait en faire des durs au grand cœur, des hommes d’expérience sensibles. Passé quasi directement du ring à l’écran, Ventura, qui bluffait les plus grands par son incroyable naturel devant la caméra, ne resta pas longtemps cantonné au statut d’acteur de second plan mais accéda rapidement aux premiers rôles : Le gorille vous salue bien de Bernard Borderie dès 1958, puis Classe tous risques de Claude Sautet dans lequel il partage l’affiche avec Belmondo. C’est sous la direction de Jacques Deray, de Jean-Pierre Melville, de Robert Enrico, et José Giovanni que le jeu d’acteur de Lino Ventura s’exprimera pleinement : il joue dans Les grandes gueules, Le deuxième souffle et Les aventuriers. Sa présence d’acteur a séduit le public, et conquis bien des cinéastes : Edouard Molinaro, Henri Verneuil, Vittorio de Sica, Claude Lelouch, Georges Lautner, Giuseppe Ferrara, Carlos Saura, Yves Boisset, Claude Miller …

Au programme :

TOUCHEZ PAS AU GRISBI, de Jacques Becker (1954). "Le premier film vrai sur ce milieu fermé qu’on appelle le milieu" claironnait la bande-annonce. En effet, Touchez pas au grisbi, en plongeant pour la première fois le public au cœur des bas-fonds parisiens, donne naissance à un genre nouveau, le film policier "à la française" et marque ainsi la fin du monopole des films noirs américains. L’évocation, certes magistrale, du milieu de la pègre parisienne est à ce point novatrice, qu’il a été décidé ne pas présenter le film à Cannes, jugeant qu’il donnerait, malgré la notoriété de Jean Becker, une mauvaise image de la France. Cette adaptation du roman du même nom d’Albert Simonin entièrement rédigé en argot, avait d’ailleurs été largement "édulcorée" afin d’en faciliter la compréhension aux non-initiés. Ce film, qui est aussi une réflexion sur le vieillissement et l’amitié, sera le point de départ de la carrière de l’ancien lutteur, Lino Ventura, et de sa grande amitié avec Jean Gabin. Vendredi 1er novembre à 15h15, samedi 2 à 20h, mercredi 6 à 18h30, dimanche 10 à 17h30.

RAZZIA SUR LA CHNOUF, d’Henri Decoin (1955), avec Jean Gabin, Marcel Dalio, Lino Ventura, Albert Rémy, Lila Kedrova. Cette descente dans le milieu du trafique de drogue, adaptée du roman d’Auguste Le Breton, auteur vedette du polar à la française de l’époque, est très représentative du genre : violence, caïds, milieux interlopes, policiers ironiques, un brin de machisme… Lino Ventura, collaborant ici pour la deuxième fois avec le monument Jean Gabin, est alors en passe de devenir lui aussi l’une grandes figures du cinéma français que l’on sait. Vendredi 1er novembre à 22h15, dimanche 3 à 13h15, lundi 4 à 21h, jeudi 14 à 18h30.

CLASSE TOUS RISQUES, de Claude Sautet (1960). Avec Lino Ventura, Sandra Milo, Jean-Paul Belmondo, Marcel Dalio, Simone France. Si ce film reste un polar, il marque un tournant à la fois dans le genre et dans la filmographie de Lino Ventura : il ne donne pas dans les poncifs du film policier, ici point de place pour le mythe du gangster, mais propose une vision réaliste d’un quotidien presque banal du malfrat qui, lui aussi doit faire face aux affres de la vie. Thème cher à Claude Sautet, Lino Ventura, tout en retenue, campe avec une remarquable finesse un gangster vieillissant qui se lie d’amitié avec un jeune débutant faisant ses premiers pas dans le milieu. Ce "petit jeune" débute d’ailleurs aussi au cinéma, il s’agit d’un certain…Jean-Paul Belmondo. Les vendredi 1er novembre à 17h30, mercredi 13 à 21h, dimanche 17 à 15h15.

CENT MILLE DOLLARS AU SOLEIL, d’Henri Verneuil (1964), avec Jean-Paul Belmondo, Lino Ventura, Reginald Kernan, Bernard Blier, Gert Fröbe. Après Classe tous risques, c’est dans ce film que Lino Ventura et Jean-Paul Belmondo feront équipe une deuxième et dernière fois. Cent mille dollars au soleil, film d’aventure parfois désopilant grâce aux dialogues de Michel Audiard, tourné entre la France et le Maroc, offre à Lino Ventura un rafraîchissant "changement de décor" et lui permet de sortir enfin de ses éternels rôles de truands de film noirs. Malgré une critique très dure, le film présenté à Cannes, vu comme un "sous Salaire de la peur", était jugé vulgaire et colonialiste, la presse finit par y voir un très efficace divertissement et il connut un beau succès public. Samedi 2 novembre à 22h15, dimanche 10 à 13h, vendredis 15 à 20h, et 22 à 18h.

LE DEUXIEME SOUFFLE, de Jean-Pierre Melvile (1966), avec Lino Ventura, Paul Meurisse, Raymond Pellegrin, Christine Fabréga, Marcel Bozzuffi. "Je me souviendrai toujours de l’émotion que j’ai ressentie la première fois où j’ai vu le film de Melville, au moment où Gu (Lino Ventura) décide soudain de ne pas tuer Ricci", raconte Alain Corneau dans une interview (Nouvel Observateur, 2007), alors qu’il venait d’adapter, 40 ans après Melville, Le deuxième souffle au goût du jour. C’est précisément dans cette scène là, que la complexité et la dimension tragique du personnage interprété par Lino Ventura apparaît : c’est un tueur et, paradoxalement, il incarne une certaine morale, celle du fameux code de l’honneur. Un rôle sur mesure pour la "carrure" de cet acteur qui, même cantonné dans un énième rôle de tueur, prouve une fois de plus la grande finesse de son jeu. Samedi 9 novembre à 19h30, vendredi 15 à 15h15, diimanche 17 à 20h.

LES AVENTURIERS, de Robert Enrico (1967), avec Alain Delon, Lino Ventura, Joanna Shimkus, Serge Reggiani, Hans Meyer. Avant ce film, Lino Ventura avait tourné à deux reprises avec Robert Enrico. C’est d’ailleurs lui qui apporta au réalisateur ses deux plus grands succès : d’abord avec Bourvil, dans Les grandes gueules, puis avec Brigitte Bardot dans Boulevard du rhum. Le film Les aventuriers porte bien son nom, puisqu’il s’agit d’un authentique film d’aventure, une histoire de chasse au trésor, telles celles qu’imaginent les hommes dans leur enfance. Aucun ingrédient ne manque : un trésor englouti au fond de l’océan, un décor exotique, une belle héroïne, des voiliers, des cascades, des bagarres, des avions, des bolides ultra rapides et tout cela servi par un Alain Delon encore loin de son jeu stéréotypé, fragile et toute en finesse, tandis que Lino Ventura apparaît solaire, on l’aura rarement vu rire autant sur un écran. Vendredi 22 novembre à 22h15, samedi 23 à 20h15, vendredi 29 à 17h30.

L’ARMÉE DES OMBRES (1969), d’après le roman de Kessel, avec Lino Ventura, Simone Signoret, Paul Meurisse, Jean-Pierre Cassel, Serge Reggiani, Paul Crauchet et Claud Mann. Avant ce film, Melville avait déjà dirigé Lino Ventura aux côtés de Paul Meurisse, dans Deuxième souffle en 1966. L’armée des ombres, un drame qui relate la vie et les activités complexes d’un réseau de résistants sous l’occupation allemande, fait référence aux propres souvenirs de résistant de Melville. Le film, sorti au lendemain des événements de mai 68 dans une France encore mal réveillée, dans un climat contestataire et en proie aux incertitudes, raviva des blessures enfouies. On reprocha notamment à Melville son indéfectible fidélité à De Gaulle, qui incarnait la résistance et était au pouvoir lors des événements de 68. Ce film à la distribution prestigieuse, reste cependant une œuvre remarquable, qui se démarque de l’image d’une résistance héroïque traditionnellement soutenue. Samedi 16 novembre à 19h30, vendredi 22 à 15h15, dimanche 24 à 20h.

LE CLAN DES SICILIENS, d’Henri Verneuil (1969), avec Jean Gabin, Alain Delon, Lino Ventura, Irina Demick, Gérard Buhr. L’affiche de l’époque présentait les trois acteurs principaux, occupant chacun le panneau d’un triptyque et pointant d’un revolver le spectateur…coup de maître puisque ce film réunit pour l’unique fois les trois monstres sacrés du cinéma français : Jean Gabin, Lino Ventura et Alain Delon. Ce polar couronné de succès marque aussi les débuts d’Ennio Morricone pour le cinéma français. Comme le film et comme souvent chez Morricone, cette partition remportera un immense succès. Vendredi 8 novembre à 17h30, samedi 30 à 22h15.

L’EMMERDEUR, d’Edouard Molinaro (1973), avec Lino Ventura, Jacques Brel, Caroline Cellier, Jean-Pierre Darras, Nino Castelnuovo. Ce film qui commence comme un banal film de gangster se révèle rapidement être une véritable comédie, dont certaines situations ont tout du vaudeville. Lino Ventura campant un tueur à gage consciencieux et parfaitement organisé, se voit, au lieu de tuer sa cible, contraint de sauver une vie. Celle d’un mari trompé aux tendances suicidaires, qui figure le (collant) grain de sel venant faire dérailler toute cette manigance parfaitement huilée. Le duo, Lino Ventura luttant pour conserver sa placidité et Jacques Brel en insupportable emmerdeur, est tout simplement savoureux. Samedi 16 novembre à 22h15, imanche 24 à 17h30, mercredi 27 à 21h.

LA GIFLE, de Claude Pinoteau (1974). Avec Lino Ventura, Annie Girardot, Isabelle Adjani, Michel Aumont, Nathalie Baye. " Dis donc, l’amour, c’est pas toujours la fête, hein ?" ironise la jeune Isabelle Adjani dans le rôle d’Isabelle, face à son père maussade, interprété par Lino Ventura. Le film est à l’image de cette réplique et de la scène-titre : une comédie de mœurs légère ou tout est démesure. Tout y passe, conflits politiques, familiaux, amoureux et conflits de générations. Outre Ventura et Adjani, on retrouve avec plaisir Nathalie Baye et le jeune Francis Perrin qui livre gag sur gag. Samedi 2 novembre à 15h15, lundi 4 à 18h30, jeudi 11 à 21h, samedi 9 à 15h15.

GARDE A VUE, de Claude Miller (1981). Avec Lino Ventura, Michel Serrault, Romy Schneider, Guy Marchand, Didier Agostini. Bien qu’ayant collaboré avec Godard et Truffaut, Claude Miller prend le contre-pied de la nouvelle vague avec ce film entièrement tourné en studio et aux dialogues très soignés signés Audiard. C’est dans un quasi huis-clos que Lino Ventura, le policier et Michel Serrault, le coupable présumé, s’affrontent. La tension de ce duel psychologique parcourt tout le film. Garde à vue est l’avant dernier film dans lequel Romy Schneider jouera. Jeudi 21 novembre à 21h, dimanche 24 à 13h30, samedi 30 à 20h.

ESPION, LÈVE-TOI, d’Yves Boisset (1982), avec Lino Ventura, Michel Piccoli, Bruno Cremer, Bernard Fresson, Marc Mazza. Ce film d’espionnage, dans lequel on retrouve Guy Marchand face à Lino Ventura, a été tourné à Berne, Munich, Paris et Zurich. À l’origine, Espion, lève-toi devait être réalisé par Andrzej Zulawski mais Lino Ventura, bien qu’appréciant l’homme et son œuvre, refusa catégoriquement de tourner pour lui. Selon lui, la seule lecture d’un scénario lui permettait de savoir immédiatement, instinctivement, s’il s’agissait d’un rôle qu’il saurait interpréter ou non. Or l’univers du cinéaste polonais lui parut trop éloigné de lui. C’est donc Yves Boisset qui fut finalement choisi pour réaliser le film. Dimanche 3 novembre à 20h samedi 9 à 22h15, vendredi 15 à 18h